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Le gouvernement renonce à l'idée de créer un " divorce sans juge "

Les grandes lignes de la réforme du droit familial ont été annoncées jeudi 15 juin

La conférence sur la famille, qui a eu lieu, jeudi 15 juin, à Matignon, a donné au gouvernement l'occasion d'annoncer les grandes lignes de la réforme du droit de la famille qui sera examinée par le Parlement début 2001 : égalité des filiations légitimes, naturelles et adultérines ; ;amélioration des droits successoraux conjoints survivants ; simplification du divorce et développement de la médiation.

ANNONCER 10 milliards de francs de mesures au profit de familles, voilà qui " témoigne de l'importance que la gauche attache aux familles ", selon Lionel Jospin. La conférence de la famille, qui réunissait jeudi 15 juin à Matignon, comme chaque année, les associations familiales, des élus et les partenaires sociaux, a, selon Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, permis de lever les " craintes qui avaient été exprimées, notamment par le président de la République, sur le fait que l'excédent de la branche famille n'aille pas à la famille. La politique définie aujourd'hui dépasse largement cette somme. Le budget de l'État sera mis à contribution ".

Les principales décisions (Le Monde du 16 juin) concernent la création d'un fonds d'aide à l'investissement pour inciter les collectivités locales à investir dans les crèches et halte-garderies; la possibilité de cumuler, pendant deux mois, lors de la reprise d'une activité, l'allocation parentale d'éducation et un salaire ;l'instauration d'un congé " enfant malade " assorti d'une allocation de présence parentale; enfin une réforme des aides personnelles au logement.

C'est cette dernière qui satisfait le plus Hubert Brin, président de l'Union nationale des associations familiales, représentant la majeure partie des associations familiales. " 1l était insupportable de penser que deux familles ayant les mêmes revenus ne reçoivent pas la même aide au logement en fonction de la provenance de ces revenus -RMI ou activité. " M. Brin regrette néanmoins que le prolongement des prestations familiales jusqu'à 22 ans n'ait pas été abordé, parce que les " situations les plus difficiles sont celles des familles ayant des jeunes adultes à charge ".

 

LIEN DE FILIATION

La conférence aura aussi été l'occasion de confirmer les grandes orientations de la réforme du droit de la famille préparée par Élisabeth Guigou depuis 1997, qui devrait être examinée par le Parlement au début 2001. En matière de filiation, la loi établira l'égalité de droit entre les enfants légitimes,

naturels et adultérins, facilitera et solennisera l'établissement de la filiation de l'enfant, et limitera les possibilités de contestation de ce lien de filiation. Le changement de régime matrimonial ne sera plus soumis à homologation judiciaire, et les droits successoraux du conjoint survivant seront améliorés.

 

L'idée d'un divorce sans juge est définitivement abandonnée. Mais le divorce sur requête conjointe est simplifié : il ne nécessitera plus qu'une seule comparution devant le juge. Dans le cas d'un divorce à la demande de l'un des époux, la cause du divorce n'aura plus à être énoncée avant l'ordonnance de non-conciliation: une tentative de conciliation se déroulera "sur des bases neutres" devant le juge. Ce n'est qu'en cas d'échec et de rédaction d'une ordonnance de non-conciliation, que la cause de divorce figurera dans l'assignation devant le tribunal. Lorsque les époux sont d'accord sur le principe de la séparation mais non sur ses conséquences, aucun grief ne sera énoncé. Le divorce pour faute, qui

est maintenu, n'entraînera plus de sanction financière à l'égard de l'époux contre lequel il est prononcé. En cas de rupture de la vie commune, il suffira au juge, pour prononcer le divorce, de constater la séparation du couple depuis trois ans, sans sanction financière à l'encontre de l'époux demandeur.

 

RÉSIDENCE ALTERNÉE

La place de la médiation sera accrue : en cas de conflit familial, le juge pourra l' ordonner " sans avoir à obtenir l'accord des parties. La résidence alternée des enfants de parents séparés sera rendue possible par la suppression de l'obligation faite aux tribunaux de fixer la résidence habituelle de l'enfant.

Enfin dans les familles recomposées ou celles dans lesquelles les enfants sont confiés à des proches, les tiers pourront bénéficier d'une " délégation de l'autorité parentale " pour accomplir des actes nécessaires à la vie scolaire ou aux activités de loisir de l'enfant.

 

Pascal Krémer

LE MONDE / SAMEDI 17 JUIN 2000